L’espérance en entreprise : agir dans l’incertitude, croire malgré tout
EFFIG Conseils Blog
Dans un contexte économique, écologique, social et géopolitique profondément instable, l’espérance peut sembler être un mot naïf, presque déplacé. Pourtant, c’est peut-être aujourd’hui qu’elle est la plus nécessaire. Dans ce monde de tensions et de paradoxes, l’entreprise, souvent pointée du doigt, peut redevenir un lieu d’incarnation de l’espérance – à condition de renoncer à l’idéal parfait pour lui préférer une démarche d’engagement humble, lucide, mais déterminée.
L’espérance dans un monde en crise
Notre époque est traversée par des secousses multiples :
- Crises économiques et financières : inflation persistante, hausse du coût des matières premières, incertitudes sur les taux d’intérêt, instabilité des marchés ?
- Crise écologique : exigences croissantes de transformation, pression réglementaire, nécessité de concilier impact environnemental et viabilité économique.
- Crise sociale : quête de sens au travail, difficulté à fidéliser les talents, tensions autour des conditions de travail et du bien-être.
- Crise géopolitique : conflits armés, réorganisation des chaînes de valeur, mondialisation remise en question.
Dans ce contexte, la tentation du repli, de la désertion ou du cynisme est grande. Faut-il Déserter ou s’engager ? L’enjeu devient alors : où va s’ancrer notre espérance ?
1. Le piège : la quête de stabilité qui paralyse
L’une des réactions naturelles à l’incertitude est de chercher des repères fixes, des certitudes absolues. Mais cette quête, lorsqu’elle devient obsessionnelle, peut devenir un frein à l’action.
- Les dirigeants veulent des garanties, des modèles fiables. Mais dans un monde complexe, cela existe-t-il vraiment ?
- La certitude absolue est un mythe. Elle mène à l’immobilisme, à la peur de se tromper.
- Ce dont nous avons besoin, ce sont de croyances raisonnables et évolutives : des hypothèses d’action testables, révisables.
Trois principes pour sortir de l’immobilisme ou de la paralysie :
- Privilégier des croyances évolutives aux certitudes absolues.
- Tester régulièrement ces croyances pour détecter leur obsolescence.
- Explorer activement de nouvelles pistes, même inconfortables.
2. L’engagement économique et social : une tension inévitable à apprivoiser
Le cœur de la mission entrepreneuriale est traversé par une tension fondamentale : faire du profit tout en contribuant au bien commun. Il ne s’agit pas d’un dilemme insoluble, mais d’un équilibre à inventer.
- Générer du profit reste une nécessité. Mais il faut accepter de le faire dans une perspective de durabilité et non de maximisation immédiate.
- L’engagement écologique et social n’est pas un supplément d’âme, c’est une condition de pérennité.
- Vouloir tout transformer d’un coup est une illusion. L’expérimentation progressive, locale, ciblée, est une voie plus réaliste.
Plutôt que de rejeter le système ou d’attendre un modèle parfait, il s’agit de :
- Reconnaître ce qui fonctionne déjà,
- S’appuyer sur ces points d’appui pour aller plus loin,
- Ne pas opposer performance et collaboration, mais construire des ponts entre les deux.
3. L’illusion de l’idéal et le danger du « grand saut »
Dans un monde complexe, viser un idéal parfait peut s’avérer contre-productif.
- La progression linéaire vers l’idéal n’existe pas. Le réel est accidenté, plein d’optimums locaux : on peut être tenté de quitter une situation fonctionnelle pour un idéal abstrait… et se retrouver dans pire.
- Même une situation très proche de l’idéal peut être fragile. L’approximation n’est pas toujours une avancée.
- L’histoire l’a montré : les révolutions idéologiques, en entreprise comme ailleurs, se heurtent à la complexité du terrain.
Alors que faire ?
L’approche d’Amartya Sen offre une voie :
Comparer deux options proches, choisir la meilleure, avancer d’un pas, recommencer.
Ce pragmatisme modeste refuse le saut aveugle et choisit la marche continue.

Une espérance industrielle : l’exemple de LIP
Qui se souvient, dans les années 1970, de l’entreprise horlogère LIP, fleuron industriel de Besançon, et de ses graves difficultés ? Alors que les dirigeants annoncent des licenciements massifs, les ouvriers décident de ne pas se résigner. Ils se battent pour sauver les emplois et relancent eux-mêmes la production.
Ce mouvement, profondément ancré dans une espérance collective, a marqué l’histoire sociale française, comme expression de foi dans la capacité des personnes à reprendre en main leur destin, à agir dans un monde incertain.
Aujourd’hui, LIP existe encore, témoignage d’une espérance qui ne nie pas la réalité mais la traverse, portée par la volonté d’agir.
Une espérance enracinée ailleurs : spiritualité et action
Pour ceux qui croient, l’espérance ne repose pas uniquement sur ce qui est observable ou mesurable. Elle s’enracine dans une promesse : celle que toute action juste, aussi petite soit-elle, porte du fruit – même si ce fruit n’est pas immédiatement visible.
L’espérance ne nie pas l’incertitude ; elle l’habite autrement. Elle ne dit pas que tout ira bien. Comme l’écrit Timothy Radcliffe : « L’espérance, ce n’est pas l’optimisme. C’est la conviction que ce que nous faisons a du sens, même si nous n’en voyons pas encore les fruits. »
Cette espérance-là libère. Elle permet d’agir sans tout maîtriser, de semer sans garantie de moisson, d’avancer sans voir la fin. Elle est confiance active et mouvement intérieur, qui donne à l’entreprise une dimension plus grande que ses résultats.
Conclusion : espérer, c’est agir
Dans l’incertitude, l’espérance n’est pas une fuite ni une attente passive. Elle est un acte volontaire, un engagement à persévérer malgré l’ambiguïté, à avancer même quand le terrain est instable.
L’entreprise peut être un laboratoire d’espérance : un lieu où l’on ose expérimenter, ajuster, chercher ensemble. Elle peut incarner une espérance modeste mais solide : celle du pas en avant, de la décision imparfaite mais juste, de la confiance dans le fait que ce que nous faisons a du sens.
Et si, dans le désert du doute, l’espérance était ce pas de plus que l’on fait quand même ?
Crédits photos : ivan bandura – hugo beurey – https://unsplash.com/

Catherine
« On écrit pour goûter la vie deux fois, dans l’instant et rétrospectivement »
Anaïs Nin

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